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L’être de la peinture dans la névrose…
Lot 1051

L’être de la peinture dans la névrose…

Estimation : 100 / 300€
Année : 1960
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Le lot 51, élément actif du corpus Gastion Ferdière, est un livret de 16 pages (couverture & page 243 à 255) du célèbre psychanalyste Olivier Loras : « L’être de la peinture dans la névrose et la psychose. La relation « ontique-esthétique » comme dynamique psycho-thérapique. » Ce livret est une communication au « Congrès international d’art psychopathologie de Catania en 1960. Il parut dans la revue Confin. Psychiat en 1963. Un envoi touchant et très intéressant se trouve sur le plat intérieur (2e page) : «  A G. Ferdière, avec ma très profonde amitié et notre commune pensée de l’Art… dans son expression et sa relation humaine. Loras le 6 juin 1964. » Loras éclaire cette « pensée de l’art » à travers cet opus qui devient d’un coup plus que pertinent. « Le psychiatre même libéré des coercitions « organicistes » ou « fonctionnelles » est poussé à déchiffrer, analyser plus qu’à vivre les dessins, peintures de ses malades » (page 243). Une « attitude psychanalytique » à définir malgré les dangers qui attendent le praticien et notamment car « peindre c’est établir une relation normale » (page 245). Loras est un analyste rigoureux et scientifique ; son approche est une méthodologie, un chemin à suivre. Il nous indique les préjugés et présupposés à éviter. « La création ici doit être envisagée sous son aspect existentiel. Pour cela il faut discriminer les « concepts » : 1e psychiatrique voulant édifier une « nosopictographie » de l’art ; 2e psychanalytique ne considérant que le symbolisme de la création par rapport à l’inconscient ; 3e technique décomposant les éléments de la création comme un langage particulier. Nous devons éviter une pensée qui nous transformerait en psychothérapeutes structurés. » Une saine lecture.

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Auteur

Gaston Ferdière ! A l’évocation de ce nom, le regard perdu d’Antonin Artaud apparaît ; d’emblée l’impression du néophyte est désagréable. Ferdière ; celui qui a interné Artaud. Mais qui est Gaston Ferdière ? Ne souhaitant pas imposer une longue biographie, voici un échantillon de ce que l’on peut rapidement apprendre… de moins convenu. En 1930, alors qu’il a commandé à Paris une nouvelle fresque à Frédéric Delanglade, pour son hôpital, il invite à déjeuner André Breton et Marcel Duchamp. Il noue une relation extrêmement créatrice et artistique avec les surréalistes qu’il côtoie régulièrement. En 1941, afin de faire vivre son hôpital de Rodez, Gaston Ferdière n’hésite pas à pratiquer le marché noir au péril de sa vie. Ferdière est un catalyseur de rencontres, un « ovni » qui donne au « fatum » du fil à retordre et impose son rythme à la vie : « Alors que Sainte-Anne se prépare à ouvrir ses portes au public, Jean Dubuffet vient de rencontrer Gaston Ferdière qui le présente à d’autres aliénistes. Parmi ceux-ci, Lucien Bonnafé (1912-2013) , natif du Lot, qui fréquente comme Gaston Ferdière, le milieu surréaliste. Il est résistant et militant communiste et sera très impliqué dans la « psychiatrie désaliéniste » autour de 1955. Alors médecin psychiatre à l’hôpital de Saint-Alban-sur-Limagnole en Lozère, le Docteur Bonnafé soigne Auguste Forestier, auteur d’Art Brut, dont le nom sera célèbre. Il est ami de Paul Eluard qui a trouvé refuge dans cet hôpital en 1943, lui-même proche d’Aragon et d’André Breton : un chassé-croisé de rencontres déterminantes dans l’évolution de l’art psychopathologique où l’on voit apparaître des interactions entre le milieu surréaliste, l’engagement politique et le milieu médical. » (in De l’art des fous à l’art psychopathologie… » de Muriel Tisserant.) En 1946, sous le haut patronage de Ferdière est organisée la première « Exposition d’art des malades mentaux (peintures, dessins, sculptures, décorations) » ouverte au public du 16 au 28 février 1946. Evénement placé sous l’autorité du Préfet de la Seine ! Même le journal La Croix adoube Ferdière : « On s’associera à l’exhortation de ce dernier [Gaston Ferdière], d’une grande élégance morale : loin de traiter ces malades mentaux comme des étrangers […], nous devons les traiter en hommes, travailler sans relâche à leur guérison et imiter l’Eglise, comme dit le Dr Ferdière, l’Eglise qui ne perd pas de vue que la part de Dieu subsiste en eux, qu’ils ont une âme, et leur accorde des sacrements. » (L. E., « L’aliénation mentale et la création artistique », La Croix, 21 février 1946.) Ces quelques éléments de biographie et nos recherches autant que nos lectures de ce corpus extraordinaire nous ont naturellement amené à le considérer sous l’angle du « surréalisme ». Les 11 lots (44 à 54) de ce « corpus Ferdière » proposent l’articulation indispensable qu’André Breton recherchait entre les arts et notamment « l’art primitif » et la psyché humaine en ce qu’elle crée de plus authentique ; (et ce malgré son ouvrage « L’art des fous, la clé des champs » au coeur duquel, s’il se « livre à un véritable hymne à la folie, (…) n’accorde pas pour autant d’attention aux qualités esthétiques des œuvres qui sont dépendantes pour lui, de critères d’appartenance et relèvent de classifications : œuvres d’art, asilaire et médiumnique. »). Un travail de mise en relation entre Ferdière et Breton nous semble aujourd’hui indispensable au devoir d’inventaire du « surréalisme ».

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